mardi 28 avril 2009

Les Roms et l'Europe : des citoyens de seconde zone

Européens mais citoyens de 2nde zone, les roms se voient appliquer une politique discriminatoire et qui attente à leurs libertés : ici menacés d'expulsion par la République française

Ci dessous l'article de Marion Brunet, Le Monde du 18 avril 2009 :

Sur le site de Sainte-Luce, à Nantes, des familles roms se préparent à la fermeture du terrain sur lequel ils vivent depuis quatre ans. Comme chaque année après la trêve hivernale, les expulsions de Roms se multiplient en France.

A Sainte-Luce, la désillusion pour les dix-huit familles auxquelles la mairie avait prêté le terrain a débuté vendredi 17 avril. Ce jour-là, des enfants, insouciants, s'amusent sur le terrain vague sans parvenir à distraire leurs parents qui attendent à 14 heures la visite de Louis Souchal, le directeur du centre communal d'action sociale (CCAS) de la ville de Nantes.

"Quelqu'un est venu nous voir pour nous dire qu'aujourd'hui c'était fini, qu'on allait devoir partir", explique le chef du campement, Costica Nastasie, avant de sortir de sa poche une attestation de domicile. C'est Yves Aubry, le directeur de l'association Une famille, un toit, gestionnaire du site en partenariat avec la mairie, qui la leur a remise le 23 février.

Sur le papier, on peut lire que l'autorisation de séjourner sur ce terrain est valable du 1er mai 2005 au 30 avril 2009. Soit un départ dans une dizaine de jours. Certes, il était question, depuis le début, d'un bail de quatre ans, mais les Roms ont toujours voulu croire que le contrat était renouvelable.

"Je ne comprends pas comment on peut aujourd'hui enfoncer ces gens après les avoir aidés pendant quatre ans. C'est trop brutal", s'insurge une des bénévoles de l'association Solidaire Roms Nantes Est.

Sentant la polémique poindre après les dernières expulsions médiatisées, notamment à Drancy, en région parisienne, le 14 avril, la municipalité de Nantes a préféré se donner du temps à Sainte-Luce.

Arrivé sur le campement, Louis Souchal a reporté d'une semaine la "discussion" qui devait conditionner l'avenir de cette communauté. Un soulagement de courte durée pour les Roms puisque la fermeture du site de Sainte-Luce, comme celle des deux autres terrains officiels de Nantes, est inéluctable.

" Les terrains seront fermés au cours de l'été 2009, certainement après la fin de l'année scolaire, précise M. Souchal. Les sites actuels n'apportent pas de réponse valable. A Sainte-Luce, seules trois familles sur dix-huit ont trouvé une solution d'intégration durable. Nous voulons aujourd'hui bâtir un site dans un objectif d'insertion balisé et offrir de réelles perspectives aux Roms."

Entre vingt-cinq et trente familles pourraient bénéficier de ce projet. Soit environ la moitié de celles présentes sur les trois sites légalisés. Que deviendront les autres ? Dans l'incapacité de répondre, le directeur du CCAS est forcé de reconnaître que "les expulsions sont également un moyen de faire réagir l'Etat et de le mettre au pied du mur".

Alors que Costica Nastasie veut à tout prix rester en France et s'y intégrer avec ses six enfants, Louis Souchal renvoie la balle au gouvernement. Il en appelle à l'instauration d'une législation nationale pour clarifier le statut et les droits de ces citoyens européens sur le territoire français.

Complément d'information (encadré) :

10 000 à 15 000 Roms sont présents sur le sol français

Entre 10 000 et 15 000 Roms vivraient en France, selon les estimations. Dans leur très grande majorité, ils sont originaires de Roumanie et de Bulgarie et sont donc devenus, le 1er janvier 2007, citoyens européens.

A ce titre, ils bénéficient de la liberté de circulation. Mais ils demeurent soumis à des dispositions particulières en matière d'emploi.

S'ils n'obtiennent pas l'autorisation de travailler, ce qui est fréquent, ils doivent justifier de "moyens de subsistance suffisants". Faute de quoi, ils sont susceptibles d'être expulsés.

En 2008, sur les 29 796 étrangers expulsés, 10 072 Roumains et Bulgares ont été renvoyés dans leur pays avec une aide au retour dite "humanitaire" (300 euros par adulte et 100 euros par enfant), développée depuis l'été 2007. Mais cela ne les empêche pas de revenir.

Prenant conscience des limites de cette politique d'expulsion, certaines communes commencent à envisager des projets d'insertion. Mais, encore très exceptionnels, ces projets ne concernent jamais toutes les familles.

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