samedi 31 mai 2008

Joueurs de football (1)

Vous trouverez ci-dessous 3 de mes joueurs de football préférés. Pas forcément les plus célèbres, ils ont une vista particulière qui apporte quelque chose à ce sport, bref ils me font vibrer. Ji-Sung Park, Brian Laudrup l'insaisissable et imprévisible Danois et Roberto Baggio : pour ce dernier plusieurs videos qui si certaines remontrent les memes buts présentent chacune un rythme et insistent sur des phases particulières de son talent ou de sa carrière.

Ji-Sung Park : le Coréen injustement sous-estimé, meilleur Asiatique, évoluant en Angleterre :



Brian Laudrup : il a fait le bonheur de l'Italie et de l'Ecosse qui l'a adulée (enfin surtout les Rangers ...) et aussi de son équipe nationale : même le Brésil se souvient du match contre l'équipe danoise emmenée par le petit frère des Laudrup !



Peut-être aurait il pu rentrer avec le ballon dans le but !!! :



Roberto Baggio : L'enfant terrible du football italien, d'abord banni ensuite adulé : il emmenera la squadra à lui seul en finale de la coupe du monde 1994 contre le Brésil et y ratera son penalty. Aura fait le bonheur de tous les clubs italiens où il est passé. Un vrai n°10 !







Pour avoir tout l'histortique de Roberto Baggio, ces trois videos consécutives :

http://fr.youtube.com/watch?v=yXlaB4YoZpo&feature=related

http://fr.youtube.com/watch?v=2yHoqyqdfr8&feature=related

http://fr.youtube.com/watch?v=xU1BAi-FEUA&feature=related


Autres photos du marathon du mont-saint-michel





Merci aux photographes qui ont mis ces photos à disposition sur le forum "courir en bretagne" :


Photos de la star du marathon ...








dimanche 25 mai 2008

Marathon du Mont Saint Michel – 24 mai 2008

Aïe ! Quel marathon sous la pluie !

Tout d'abord quelques photos pour se mettre "dans le bain" : http://delerue.christian.club.fr/crchs/msm1/msm-1.htm

J'ai attendu le départ du marathon dans la voiture sous la pluie qui tombait drue depuis 11 heures du matin. Le départ était prévu à 16 h 30. La chaleur ne risquait pas de nous accabler cette saison !

La voiture était sur le parking du super U le plus proche et nombre de marathoniens étaient installés dans le hall du Super U pour l'occasion. On se posait la question de savoir comment on allait courir, avec ou sans coupe-vent, k-way, etc. Jamais le magasin n'a autant vendu de grands sacs poubelles que ce jour ! Pour y déposer nos affaires en consigne mais aussi et surtout pour se protéger de la pluie avant le départ.

Chaussures trempées ½ h avant le début de la course lorsqu'il faut traverser le terrain de foot qui mène aux consignes.

La chanson « Relax » puis de la musique interceltique jusqu'au départ qui se fait sous un crachin. En revanche il a tellement plu que les flaques et les rigoles sont nombreuses. Superbe vue au départ sur les parcs à moules, le tout sous un fond gris uniforme.

J'ai fait le pari assez osé – trop ! - de suivre le modérateur d'allure des 3 h à environ 300 mètres. Nous allons nous retrouver à quelques uns à faire ce pari. Déjà osé car je n'ai pas fait de marathon depuis 3 ans et ai fait une préparation courte. Et mon meilleur temps était 3 h 03 en pleine forme et bien préparé !

Une dame devant laquelle nous passons dit à son ami marathonien : reviens c'est plus rapide par ici pour arriver à la maison ! Puis « je t'attends devant la cheminée ». En fait il pleut mais il a plu tellement dru précédemment que cela nous semble très acceptable. On a craint pire.

On en rit encore et c'est le moment de quelques blagues ...

A partir du 10ème la pluie tombe à nouveau de façon forte et vent de face alors qu'on est sur la ligne droite du littoral qui mène à Cherrueix (mi parcours) : 10 km où il faut faire face au vent et à la pluie qui balaient la route : je me rends compte que je puise un peu dans les réserves pour maintenir le contact avec la flèche rouge du modérateur d'allure. Je sais aussi que je n'arriverai pas à le suivre car cela se révèle trop dur. Mais j'ai envie de continuer comme cela. Les chaussures sont lourdes d'eau.

Drôle de regard entre nos stratégies croisées : ceux qui au départ ont comme moi fait le choix de ne rien prendre que le maillot et le short se faisaient railler par les prudents !Après 8/9 kms de pluie peu soutenue, c'était à leur tour d'enlever les hauts qui leur tenaient chauds ! Mais juste après, ils le regrettaient face aux kms 10 à 20 qui furent pénibles même si à ce stade nous avions tous encore de l'énergie. Mais j'avais déjà plus puisé à ce stade que lors d'un autre marathon.

A côté de moi deux Mayennais et un jeune : nous ferons la course un temps ensemble mais eux me lâcheront. Notre but : ne pas laisser partir la petite flèche rouge à l'horizon proche.

Entrée dans Cherrueix où plein de monde nous applaudit. J'ai le droit aux premiers « Jean-François » car les organisateurs ont eu la bonne idée – première pour moi – d'inscrire nos prénoms sur les dossards. Je suis toujours au contact des trois heures.

Nous ne voyons pas le Mont de Cherrueix en raison du temps pourri. Nous ne le verrons que bien plus tard !

Je passe le semi sur les rythmes d'un marathon en 3 heures mais je sais déjà « logiquement » que je ne tiendrai pas ce rythme. (le modérateur est en 2h 58/59)

Le fait de la course survient au 23 ème km : 2 kms de sable gris qui avec toute l'eau tombée est devenu boueux à souhait. J'entends le souffle des uns et des autres à côté de moi mais personne ne parle : l'effort est intense. Moi qui avait pris la tête du groupe d'une quinzaine de coureurs me fait décrocher même si je continue à un bon rythme, tout en force derrière ce groupe. Mais je prends une cinquantaine de mètres de retard sur les uns et les autres.

Je ressors encore assez bon mais désormais tout le monde est un peu esseulé sur la route et tout le monde vient de fournir un effort important non prévu : vive le cross-country !

Tout est trempé sur soi, y compris dans les poches (kleenex "liquides", repères de temps, etc.)

Du 25 au 28 ème Km j'ai la forme qui me permet de maintenir un rythme intéressant mais dès le 28 ème je suis grillé. Pas encore Ko mais plus en mesure d'accélérer ou de maintenir un bon rythme. C'est tôt, aux 2/3 du parcours. Effet de ma préparation mais aussi de la difficulté de ce climat. Je vois chez d'autres des signes de faiblesse que je ne vois habituellement qu'après le 30ème.

Au 32ème il n'y a plus personne. Je suis mort ! Bonjour les petits bateaux. Je suis à la ramasse complète. J'avance comme un métronome qui a oublié pourquoi il court, à un rythme faible qui me fait me faire rattraper par des coureurs qui me dépassent rapidement. L'un d'eux me glisse «Courage ».

Peu avant le 34 ème, les deux genoux me font mal aux articulations. Au ravitaillement du 34 ème pour la 1ère fois je marche. Sur 4 à 500 mètres en prolongeant le ravitaillement. Je repars en courant à très faible rythme. Je ne remarcherai plus jusqu'à l'arrivée malgré la douleur. La bagarre vient de commencer.

Au 35ème, je suis toujours à faible rythme et le modérateur d'allure jaune (3h15)cette fois me double avec l'ensemble des concurrents qui s'accrochent à ses foulées. Il nous hèle pour le suivre mais je suis trois étages en dessous pour ma part.

Je finis tout à l'arrache et à l'effort. Au 36ème on voit le Mont. Bonne ou mauvaise nouvelle. Plaisir mais la suite va nous contredire : on va faire plein de bifurcations, le voir s'éloigner et revenir, etc.

Je compte les kms qui restent et chacun est long : du 36 au 39 ème, je ne m'arrêtarai pas mais je suis un homme mort. Ma tête commande à mes jambes de ne pas s'arrêter.

Je croise des gens mal. J'ai en mire un des gars de 3 heures de tout à l'heure. Mais je perds plus de place que je n'en gagne. Je donne une tape amicale à un gars de Chateauroux qui marche. Je sais qu'il ne faut surtout pas s'arrêter même si ça va mal. Ralentir au pire mais ne pas s'arrêter.

Je ferai de même à l'approche du 40ème pour un garçon dont le morphotype était un défi au marathon : poignées d'amour, forte corpulence plus ronde que longue mais il est là : je l'ai doublé de nombreuses fois mais lui aussi. Là il a craqué et marche mais je lui redis : courage, cours à ton rythme.

Beaucoup de coureurs ont des crampes. Il n'a plus plu depuis le 25ème km mais nous sommes « froids », trempés. Seule la course nous fait ne pas ressentir le froid.

J'ai aussi l'appréhension de me faire rattraper par le modérateur de 3 h 30. Je ne voudrais pas. Arrivée aux 40èmes : il n'y a plus rien mais je sais que je suis à nouveau bien. Je finis les 40-41 kms avec Jacques : un marathonien d'Abbeville dont je connais le prénom car ce vétéran est fortement applaudi. Nous sommes côte à côte et finissons à un bon rythme : on ne se fait pas dépasser.

Peu avant de le rattraper, nous avons poussé un juron avec un concurrent en apercevant au 40ème une descente sur 20 mètres suivie d'une montée tout aussi rude, dans la boue grise : un parcours lié aux travaux de désensablement du Mont. Un effort dur à ce stade de la partie.

Au 41ème je lâche Jacques et me lance dans un sprint. Arrivée comparable à une montée de col sur le tour de France : difficile de se frayer un chemin et surtout de dépasser les concurrents moins rapides.

Depuis le 40ème on n'a plus les repères kilométriques : on est sur la chaussée qui mène au Mont. Je ne sais pas en conséquence si j'ai lancé mon sprint trop tôt ou tard. En fait bien, lorsque les barrières écartent les spectateurs, j'accélère une dernière fois et passe en trombe, sous un chronomètre géant indiquant 3 h 20 et des poussières. J'arrête mon chronomètre à 3 h 20 11 secondes.

Mon père qui m'a vu arriver me dit : tu finis frais comparativement à d'autres. Impression trompeuse. S'il m'avait vu dix kilomètres avant.

Ne serait ce qu'au 39ème où je suis passé dans le temps du marathon de Stockholm, mon record actuel (3 h 03)

Je ne sais pas pourquoi mais j'arrive toujours à finir « en volant » même quand je suis très mal sur un marathon. En revanche je serai incapable de faire un km de plus.

Je suis content car je ne suis qu'à 5 minutes des 3 h 15. C'est mon 3ème temps sur 6 marathons et les conditions ont été dures. Ce temps équivaut à mon 2nd temps celui de Lisbonne en 3 h 18 qui s'était déroulé sous un ciel plus clément. Surtout c'est un belle façon de renouer avec le marathon : je fais à nouveau partie des marathoniens. Et à défaut de préparation, ma tête a pris le dessus sur mes jambes après le 30ème. C'est là que je sais que nous avons tous vécu quelque chose de génial.

Tous les temps des meilleurs sont également en retrait des performances habituelles.

Un lien vers le marathon, article de presse sur le temps du marathon du Mont Saint Michel :

http://www.rennes.maville.com/Le-marathon-du-Mont-Saint-Michel-battu-par-la-pluie-/re/actudet/actu_dep-635825------_actu.html

Très bonne organisation : nous avons regagné les voitures par une navette qui accompagne les marathoniens et leurs hôtes : je suis trop fatigué pour rester et encourager ceux qui continuent d'arriver, contrairement à d'autres marathons.

Les jambes hurlent leur douleur mais çà je suis habitué.

Trop drôle : au ravitaillement à l'arrivée, les personnes mangent moins les fruits (oranges ou bananes, etc.) que les chips et le cola distribué par Carrefour. Nous sommes mieux à même de manger cela à ce moment et c'est ce dont ils ont envie ! La privation peut-être qui a précédé ! Moi je ne mange pas car mon corps n'absorberait pas. Mais deux heures plus tard, je mangerai les chips et le cola dans la voiture sur le chemin du retour, envieux que j'étais d'avoir vu mes collègues manger ces choses « interdites » et si bonnes !!

Mille pattes : merci à la personne qui se reconnaîtra : j'ai pensé de temps en temps à ces milliers de petites jambes à partir du 30ème km ...

le Mont : un des coureurs arrivé avec moi me dit tandis que nous sommes assis (aïe pour se relever !) : tout çà pour voir un caillou dans la flotte ! Mais je ne fais pas le rapprochement facilement et ne regarde pas le Mont. Ce n'est qu'une fois changé et assis, attendant que Papa me retrouve que je me tourne enfin vers le Mont et le vois réellement pour la 1ère fois. Silhouette lointaine lors de la course, et complètement oublié lors de l'arrivée, je le vois enfin ! Au moment de repartir ou presque. L'effort a dépassé le but !

J'ai fini 473 sur 3401 participants.

Pour d'autres réactions sur notre marathon : http://courirenbretagne.forumactif.com/le-marathon-f3/marathon-du-mont-saint-michel-2008-t1579-40.htm#29098







24/05: ambiance au Marathon du Mont Saint-Michel - Ma-Tvideo France3
24/05: ambiance au Marathon du Mont Saint-Michel - Ma-Tvideo France3



Et un reportage intéressant sur les meneurs d'allure ... avec vue sur le Mont par beau temps ...






Marathon du Mont-Saint-Michel : suivez le meneur! - Ma-Tvideo France3
Marathon du Mont-Saint-Michel : suivez le meneur! - Ma-Tvideo France3

Marathon du Mont-Saint-Michel : suivez le meneur! - Ma-Tvideo France3
Pour tenir le rythme, certains coureurs ont recours aux services d'un meneur d'allure…Ils sont à la fois des lièvres et des tortues en garantissant un bon chrono, tout en gèrant l'effort au long du parcours…



Visage et éthique

"Autrui qui peut souverainement me dire non, s'offre à la pointe de l'épée ou à la balle du revolver et toute la dureté inébranlable de son « pour soi » avec ce non intransigeant qu'il oppose, s'efface du fait que l'épée ou la balle a touché les ventricules ou les oreillettes de son coeur. Dans la contexture du monde il n'est quasi rien. Mais il peut m'opposer une lutte, c'est à dire opposer à la force qui le frappe non pas une force de résistance, mais l'imprévisibilité même de sa réaction. Il m'oppose ainsi non pas une force plus grande – une énergie évaluable et se présentant par conséquent comme si elle faisait partie d'un tout – mais la transcendance même de son être par rapport à ce tout ; non pas un superlatif quelconque de puissance, mais précisément l'infini de sa transcendance. Cet infini, plus fort que le meurtre, nous résiste déjà dans son visage, est son visage, est l'expression originelle, est le premier mot : « tu ne commettras pas de meurtre ». L'infini paralyse le pouvoir par sa résistance infinie au meurtre, qui, dure et insurmontable, luit dans le visage d'autrui, dans la nudité totale de ses yeux, sans défense, dans la nudité de l'ouverture absolue du Transcendant. Il y a là une relation non pas avec une résistance très grande, mais avec quelque chose d'absolument Autre : la résistance de ce qui n'a pas de résistance – la résistance éthique. L'épiphanie du visage suscite cette possibilité de mesurer l'infini de la tentation du meurtre, non pas seulement comme une tentation de destruction totale, mais comme impossibilité – purement éthique – de cette tentation et tentative. [...] L 'épiphanie du visage est éthique. La lutte dont ce visage peut menacer présuppose la transcendance de l'expression. Le visage menace de lutte comme d'une éventualité, sans que cette menace épuise l'épiphanie de l'infini, sans qu'elle en formule le premier mot.

[...]. L'impossibilité de tuer n'a pas une signification simplement négative et formelle ; la relation avec l'infini ou l'idée de l'infini en nous, la conditionne positivement. L'infini se présente comme visage dans la résistance éthique qui paralyse mes pouvoirs et se lève dure et absolue du fond des yeux [...]

Ce texte de Lévinas issu de "Totalité et infini" est important pour moi car il insiste fortement sur le visage de l'autre, notre rapport à lui par son visage, qui me semble en effet la plus belle chose de l'autre, en beauté mais aussi en morale. Il fonde ainsi sa "théorie" sur quelque chose de très pratique, rencontré tous les jours et si profond pour autant. Ce texte appelle de ma part ces quelques commentaires :

Transcendance mais on peut l'envisager comme fondement d'une morale tournée vers autrui sans le fondement religieux. Cette transcendance peut être humaniste, comme Dostoïevski pouvait imaginer le Christ sans rapport au divin et ainsi expliquer qu'il préférait être avec le Christ plutôt qu'avec la vérité divine. Le visage de l'autre nous offre la possibilité d'une morale humaniste : le respecter dans ses choix que son visage nous indique.

Le rapport à l'autre qui nous oppose sa vision : il nous faut aimer parfois dans un ami des choix qui sont différents, qui ne correspondent pas aux nôtres et qui pourraient avoir tendance à éloigner l'autre de nous. Si nous savons fonder l'amitié et accepter que l'autre ait ses propres choix, nous sommes en mesure de fonder l'amitié avec lui, sur des bases qui ne dérangent son propre projet de vie.

le visage comme rapport à l'éthique : insistance sur le visage car c'est par le visage que tout passe. Ceci ne se veut pas une remarque prude mais simplement la vérité. On peut être sensible à d'autres parties du corps !! mais c'est bien par le visage que passe l'autre, qu'il nous « oppose » (et ne pas lire ceci de façon négative ou conflictuelle : c'est bien du rapport à l'autre et à son individualité qu'il s'agit). Cette importance accordée au visage me plaît beaucoup et surtout ce rapport au visage me paraît très juste.

- la notion de transcendance est laïcisée quelque peu même si Lévinas est un penseur juif : le visage de l'autre est ma morale, ce qui m'oblige à penser pour lui. Si Lévinas pousse son argumentation jusqu'à y voir l'interdit du meurtre de façon tout à fait logique, il dit que dans le visage se situe une élévation d'ordre éthique. « Le terme éthique dit Lévinas signifie toujours pour moi la fait de la rencontre, de la relation d'un moi à autrui ... ». Devant autrui et son visage surgit l'expérience pure de l'autre.

Lévinas n'est pas un « théoricien » et ceux qui répondraient : mais plein de gens sont tués tous les jours ne contredisent pas Lévinas qui en est bien conscient. Il signifie justement que ceux qui prennent en charge cette morale, qui ne tuent pas ne le font pas car ils voient dans le visage de l'autre cette interdiction, cette obligation de respecter l'autre pour ce qu'il est. Sans aller jusqu'à tuer, la plus ou moins grande morale dépend de ce qu'on le respecte plus ou moins dans ses choix de vie ou qu'on lui impose plus ou moins les nôtres.

L'extrait de l'ouvage de Lévinas est issu de l'ouvrage de J.Russ, la marche des idées contemporaines dans son chapitre "Ethique et Politique".


samedi 17 mai 2008

L'homme tragique ou le rapport au bonheur

« L'homme tragique n'est ni optimiste, ni pessimiste. Il n'affirme pas la vie parce qu'elle serait « bonne ». Elle est aussi bien mauvaise. Ni parce qu'elle serait « sensée ». Elle est aussi bien absurde. Il ne fait pas l'addition algébrique des « bons » et des « mauvais » cotés de la vie (d'où résulterait l'optimisme ou le pessimisme). Il refuse toute rationalisation, toute justification du monde et de la vie. Il ne dira jamais que le monde est « bon », que l'ordre des choses est « raisonnable », que la vie est « juste ». Au contraire, au point de vue moral, c'est à dire au point de vue de ce qui est raisonnable et juste, il ne voit aucune espèce de justification au monde et à la vie. Le monde est bien plutôt intolérable. Il est le lieu des contradictions quasi insoutenables, des contrastes mortels. Le tragique ne peut en aucune façon être rationalisé. Or le tragique est essentiel à la vie. Cela veut dire que le choix de la vie, de préférence à la mort, ne peut aucunement être fondé. Mais alors pourquoi affirmer la vie ? Simplement par vitalité.

La vie n'est pas affirmable par raison (l'affirmation ne se fonde pas sur une philosophie affirmative). Elle n'est affirmable que par elle-même. Dans l'homme tragique, c'est la vie qui affirme la vie – et la mort. L'homme tragique veut l'unité des contraires, c'est à dire à la fois les deux côtés de tout ce qui fait le vivant : l'amour et la fin de l'amour, l'amitié et la fin de l'amitié, l'oeuvre et la destruction de cette oeuvre, le moment heureux et la fin du moment heureux. En général, on veut retenir, garder : si l'on aime ce doit être pour toujours, etc. Mais l'homme tragique sait que la signification de ce qui est vivant ne saurait être dans la durée. Il cherche à donner à un amour, une amitié, une oeuvre, etc. la plus haute qualité possible, mais il dissocie complètement la valeur et la durée, et,dans tout ce qui fait à ses yeux la valeur de la vie, il discerne déjà le signe de ce qui va périr.

Une amitié a son début, sa croissance, sa plénitude et sa fin, comme un vivant. Un jour ou l'autre vient (ou viendrait – si l'on vivait assez longtemps) le moment d'y mettre fin. Et un aspect essentiel de l'art tragique de vivre est l'art de mettre fin. Rien ne doit, ou ne devrait, durer au-delà de sa signification réelle (ne doit survivre au temps où les mots, les gestes, etc. ont leur sens plein) : l'homme tragique détruit sans cesse en lui les branches demi-mortes laissées par la vie, sinon avec « l'éternelle joie du devenir » (comme dit Nietzsche), en tout cas sans égard pour sa peine, s'il en éprouve. »

Marcel Conche, Orientation philosophique
*
Ce texte absolument nietzschéen est particulièrement convaincant. Je lui vois personnellement quand même deux défauts, même si je suis globalement d'accord :

il ne répond pas à la question fondamentale, sinon par la dénonciation nietzschéenne des arrières-mondes, « Pourquoi y a t il quelque chose sur cette terre au lieu de rien ? »
si l'histoire a été parcourue de tels soubresauts, qu'en accord avec cette théorie de l'homme tragique, Walter Benjamin en est venu à parler d'histoire-chaos, d'où le sens avait déserté, il n'en reste pas moins qu'on se réveille étonnés à chaque fois que le monde soit encore présent, comme si les forces de vie l'emportaient toujours un tout petit peu sur les forces de mort au cours de l'histoire humaine ...même quand la situation peut paraître désespérée ...Or d'après la réflexion de l'homme tragique, à chaque fois nous aurions aussi bien pu disparaître de la terre ...
enfin, ce subjectivisme est quoiqu'en dise Conche à mon avis un pessimisme sur la nature humaine, mais il est vrai que nombre de faits sur cette terre peuvent donner raison (mais recense t on parallèlement tous les gestes bons quotidiens ...)

Le texte de Conche est particulièrement profond quand il aborde la durée :
il associe la notion de toujours à l'intensité. Ce n'est pas un mensonge de dire qu'on aime pour toujours car cela décrit l'intensité du sentiment vécu au moment où la phrase est prononcée, de manière sincère.
- couper les branches mortes : notion essentielle qui veut que retenir c'est déjà avoir perdu. Il est inutile de rechercher ce que l'autre ne veut pas ou plus, quand bien même c'est douloureux. Combat perdu d'avance. Lui rappeler les promesses passées serait ne pas comprendre cette dimension de l'homme tragique et de son rapport au temps. Et a contrario, le bonheur fait figure d'instant, soit un refus de la durée pour y inscrire le bonheur. Ce dernier serait alors la somme des instants, le bonheur serait par définition fugitif. Fuir le bonheur de peur qu'il ne se sauve ...pour reprendre Gainsbourg.

Autre point : ce texte rejoint une réflexion de JP.Vernant qu'on retrouve ailleurs sur ce blog selon laquelle certains êtres sont des êtres de la continuité et d'autres relèvent de la discontinuité. Certains ont besoin régulièrement de déchirer le tissu pour rester soi-même, d'autres sont à l'enseigne de la fidélité. Tout homme n'est pas forcément un homme tragique.

Maintenant je termine sur une réflexion de Clément Rosset qui m'a toujours laissé songeur : je vous laisse à votre appréciation car je n'ai jamais su définir mon rapport à cette citation :

J'apprécie particulièrement le rapport à la vie de la joie, oublieuse des malheurs pour être entièrement elle-même. Mais la référence au malheur et au fait que la joie y soit attentive me laisse perplexe. Et je ne sais pas si je dois trouver cela bien ou mal. Cela me gacherait ma joie que de le penser ... La joie ne serait pas un oubli ?

« Non seulement [...] la joie réussit à s'accommoder du tragique, mais encore et surtout [...] elle ne consiste que dans et par cet accord paradoxal avec lui. Car c'est justement le privilège de la joie, et la raison du contentement particulier qu'elle dispense – contentement unique parce que seul à être sans réserve – que de demeurer à la fois parfaitement conscient et parfaitement indifférent au regard des malheurs dont se compose l'existence. Cette indifférence au malheur, sur laquelle je vais revenir, ne signifie pas que la joie y soit inattentive, encore moins qu'elle prétende en ignorer, mais au contraire qu'elle y est éminemment attentive, partie première prenante et première concernée ; cela précisément en raison de son pouvoir approbateur qui lui permet d'en connaître plus et mieux que quiconque. C'est pourquoi je dirai, pour me résumer d'un mot, qu'il n'est de joie véritable que si elle est en même temps contrariée, en contradiction avec elle-même : la joie est paradoxale, ou n'est pas la joie. »

Clément Rosset, La Force Majeure.

Tous ces textes sont puisés au sein de l'ouvrage de J.Russ, La Marche des Idées contemporaines, dans son chapitre Ethique et Politique.

Bon j'ai pris plaisir à relater ces textes qui me semblent essentiels à la description du bonheur vu par la philosophie mais là j'avoue je vais aller faire la vaisselle ou repasser des chemises car mon cerveau bout et en a assez !!!


Le souci de soi : de l'antiquité à la modernité

Un type de sagesse immanente apparaît lié à la relecture des philosophies antiques.Il s'agit de réfléchir sur la rencontre entre les expériences antique et moderne du monde et aussi de prendre ses distances par rapport à la problématique chrétienne de l'interdit (mais Spinoza l'avait déjà acté).

Cette philosophie antique du souci de soi ne désigne pas un travail spéculatif et théorique, une doctrine abstraite mais bien un « exercice spirituel » destiné à former et forger les âmes : apprendre à vivre notre rapport avec le monde et les choses. Dans les écoles héllénistiques et romaines, la philosophie se donne comme un exercice, une pratique de soi et une sagesse.

Pour information, les Anciens considéraient la sagesse comme un idéal inaccessible qui règle l'action et non comme un état réalisé, et comme le rappelle Pierre Hadot, ils étaient à la recherche d'un exercice toujours fragile et renouvelé tendant à la sagesse.

L'attention à soi-même : précisons. Les Grecs unifiant le Beau et le Bien nous ont fourni un concept central : la kalokagathie, notion mi-esthétique, mi-morale. La kalokagathie désigne une fusion de la beauté et du bien, présidant parfois à la formation de soi-même, en l'absence de la loi et de l'interdit chrétiens. Comme les Grecs et les Romains nous vivons sans interdits et sans lois transcendantes : Comme le dit Michel Foucault : « Il s'agissait [ dans l'Antiquité] de savoir comment gouverner sa propre vie pour lui donner la forme qui soit la plus belle possible (aux yeux des autres, de soi-même et des générations futures pour lesquelles on pourrait servir d'exemple). Voilà ce que j'ai essayé de reconstituer : la formation et le développement d'une pratique de soi qui a pour objectif de se constituer soi-même comme l'ouvrier de la beauté de sa propre vie. »

Ainsi se constituent chez les Grecs des pratiques de soi fécondes en enseignements. Si un certain nombre de sujets refusent dans nos cultures de fonder l'éthique sur la religion et la loi transcendante, peut-être les Grecs peuvent ils leur offrir un modèle susceptible sinon d'être transposé (ce qui serait absurde), tout au moins réfléchi et médité. La Grèce classique, sans être l'âge d'or cher à certains héllénistes, est au moins substance à réflexion et paradigme vivant.

Loin d'un exposé théorique, la sagesse antique pourrait donc nous servir comme modèle d'un art de vivre.

Foucault présente les pratiques de soi qui désignent autant de techniques de soi et d'arts de vivre centrés sur l'accès à soi : il s'agit de prendre soin de soi-même, de transformer notre existence en une sorte de souci de soi permanent, de développer un art de la connaissance de soi, en bref de se convertir à soi-même. Ces lignes extraites du « Souci de soi », décrivent ces travaux sur soi-même, tels qu'ils se pratiquaient dans les deux premiers siècles de notre ère.

« On peut caractériser brièvement la culture de soi par le fait que l'art de l'existence – la techne tou biou ( littéralement, l'art ou l'exercice de la vie) sous ses différentes formes – s'y trouve dominé par le principe qu'il faut « prendre soin de soi-même » ; c'est ce principe du souci de soi qui en fonde la nécessité, en commande le développement et en organise la pratique. Mais il faut préciser : l'idée qu'on doit s'appliquerà soi-même, s'occuper de soi-même est en effet un thème fort ancien de la culture grecque [...]

Or, c'est ce thème du souci de soi, consacré par Socrate, que la philosophie ultérieure a repris et qu'elle a fini par placer au coeur de cet « art de l'existence » qu'elle prétend être. C'est ce thème qui, débordant de son cadre d'origine et se détachant de ses significations philosophiques premières, a acquis progressivement les dimensions et les formes d'une véritable « culture de soi ». Par ce mot, il faut entendre que le principe du souci de soi a acquis une portée assez générale : le précepte qu'il faut s'occuper de soi-même est en tout cas un impératif qui circule parmi nombre de doctrines différentes ; il a pris aussi la forme d'une attitude, d'une manière de se comporter, il a imprégné des façons de vivre ; il s'est développé en procédures, en pratiques et en recettes qu'on réfléchissait, développait, perfectionnait et enseignait ; il a constitué ainsi une pratique sociale, donnant lieu à des relations interindividuelles, à des échanges et communications et parfois même à des institutions ; il a donné lieu enfin à un certain mode de connaissance et à l'élaboration d'un savoir.

Dans le lent développement de l'art de vivre sous le signe du souci de soi, les deux premiers siècles de l'époque impériale peuvent être considérés comme le sommet d'une courbe : une manière d'âge d'or dans la culture de soi, étant entendu bien sûr que ce phénomène ne concerne que les groupes sociaux, très limités en nombre, qui étaient porteurs de culture et pour qui une techne tou biou pouvait avoir un sens et une réalité. [...]

Soigner son âme était un précepte que Zénon avait, dès l'origine, donné à ses disciples et que Musonius, au 1er siècle, répètera dans une sentence citée par Plutarque : « Ceux qui veulent se sauver doivent vivre en se soignant sans cesse. On sait l'ampleur prise chez Sénèque, par le thème de l'application à soi-même. C'est pour se consacrer à celle-ci qu'il faut selon lui renoncer aux autres occupations : ainsi pourrait on se rendre vacant pour soi-même (sibi vacare). Mais cette « vacance » prend la forme d'une activité multiple qui demande qu'on ne perde pas de temps et qu'on ne ménage pas sa peine pour « se faire soi-même », « se transformer soi-même », « revenir à soi ». Se formare, sibi vindicare, se facere, se ad studia revocare, sibi applicare, suum fieri, in se recedere, ad se recurrere, secum morari, Sénèque dispose de tout un vocabulaire pour désigner les formes différentes que doivent prendre le souci de soi et la hâte avec laquelle on cherche à se rejoindre soi-même (ad se properare). Marc-Aurèle, lui-aussi, éprouve une même hâte à s'occuper de lui-même : ni la lecture, ni l'écriture ne doivent le retenir plus longtemps du soin direct qu'il doit prendre de son propre être : « Ne vagabonde plus. Tu n'es plus destiné à relire tes notes, ni les histoires anciennes des Romains et des Grecs, ni les extraits que tu réservais pour tes vieux jours. Hâte-toi donc au but ; dis adieu aux vains espoirs, viens toi en aide si tu te souviens de toi-même [...], tant que c'est encore possible ».

C'est chez Epictète sans doute que se marque la plus haute élaboration philosophique de ce thème. L'être humain est défini, dans les Entretiens, comme l'être qui a été confié au souci de soi. Là réside sa différence fondamentale avec les autres vivants : les animaux trouvent « tout prêt » ce qui leur est nécessaire pour vivre, car la nature a fait en sorte qu'ils puissent être à notre disposition sans qu'ils aient à s'occuper d'eux-mêmes, et sans que nous ayons nous, à nous occuper d'eux. L'homme, en revanche, doit veiller à lui-même : non point cependant par suite de quelque défaut qui le mettrait dans une situation de manque et le rendrait de ce point de vue inférieur aux animaux ; mais parce que le dieu a tenu à ce qu'il puisse faire librement usage de lui-même ; et c'est à cette fin qu'il l'a doté de la raison ; celle-ci n'est pas à comprendre comme substitut aux facultés naturelles absentes ; elle est au contraire la faculté qui permet de se servir, quand il faut et comme il faut, des auters facultés ; elle est même cette faculté absolument singulière qui est capable de se servir d'elle-même : car elle est capable de «  se prendre elle-même ainsi que tout le reste pour objet d'étude ». En couronnant par cette raison tout ce qui nous est déjà donné par la nature, Zeus nous a donné la possibilité et le devoir de nous occuper de nous-mêmes. C'est dans la mesure où il est libre et raisonnable – et libre d'être raisonnable – que l'homme est dans la nature l'être qui a été commis au souci de lui-même. Le dieu ne nous a pas façonnés comme Phidias son Athéna de marbre, qui tend pour toujours la main où s'est posée la victoire immobile aux ailes déployées. Zeus « non seulement t'a créé, mais il t'a de plus confié et livré à toi seul ». Le Souci de soi pour Epictète est un privilège-devoir, un don-obligation qui nous assure la liberté en nous astreignant à nous prendre nous mêmes comme objet de toute notre application. »

Cette tentative de fonder notre vie pour atteindre le bonheur sans réflexion transcendante est intéressante : elle se fonde sur ce que certains pourrait appeler un égoïsme de soi encore que le premier rapport à l'autre commence par le souci apporté à soi-même, marque de respect envers l'autre. Il en reste qu'on peut préférer des attitudes de vie plus expressément centrées sur autrui et son bonheur, et qui comportent une partie transcendante. Typiquement Lévinas et son éthique du visage qui voit en l'autre la marque de notre affect et de ce que nous pouvons fournir de meilleur, et voit dans le visage de l'autre et l'imprévisibilité de ses actions à respecter la transcendance de l'autre qui en nous opposant son « pour soi » nous invite à respecter et à vouloir pour autrui ..Une transcendance qui est l'autre, son altérité, le fait qu'il réfléchisse pour soi et ses buts et nous oblige à les prendre en compte, ce qui doit fonder nos morale et bonheur.. soit une transcendance qui n'est pas directement divine mais directement tournée vers l'autre. Mais ceci fera l'objet d'un autre article ...

Cet article est directement emprunté à l'ouvrage de J.Russ, "La marche des idées contemporaines" dans son chapitre "Ethique et Politique".

vendredi 16 mai 2008

Sinik : La main sur le coeur

Sinik

L'album de Sinik, La main sur la coeur, a été nominé début 2006 aux victoires de la musique mais cet album avait déjà fait son bout de chemin

Surtout cette nomination est intervenue l'année de la rébellion ouverte à Clichy sous Bois, deux ans avant Villiers le Bel, après que les policiers aient forcé des jeunes à se réfugier dans un transformateur électrique.

Tous les jeunes qui se sont affrontés aux forces de l'ordre connaissaient ces chansons ciselées comme des armes de poing : elles ont motivé la révolte aussi surement que l'intervention policière.

Je prends ici le parti de vous dire que cette révolte, je l'analyse comme un signe de bonne santé mentale de la part de ces jeunes.

L'égalité et la fraternité ont déserté au quotidien dans la relation qui est offerte à ces jeunes : les dés sont clairement pipés (loyer emploi, est il besoin de prolonger) et ils ont raison de montrer leur détermination d'en sortir.

Lors de la révolte, le ministre de l'intérieur et ses acolytes ont préféré insister sur quelques chansons particulièrement haineuses envers les forces de l'ordre. Ce ne sont pas celles qui ont eu la plus grande influence, qui ont le plus profondément envahi la tête de ces jeunes. Car le talent se trouvait chez Sinik. Influence décisive. Album qui constituera le temps venu un document d'histoire pour connaître la version portée par ces jeunes. La polémique était plus aisée avec la caricature. Il était plus commode pour le pouvoir de stigmatiser quelques chansons haineuses que d'essayer d'affronter la verve d'un chanteur qui faisait face lucidement à la réalité. La profondeur s'associe si bien à la vérité que ces chansons ont justifié les actes : comme le dit Sinik lui même :

Mentalité nique la terre quand les keufs passent lance une pierre
Autant de pression dans cette phase que dans une bière

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la question n'est pas de savoir s'il y aura de nouvelles émeutes mais où et quand. L'Ined en 2004 indiquait quelques mois avant l'explosion de violence dans un rapport sur la France : « Le plus grand nombre de ménages étrangers se trouve en Seine-Saint-Denis (26,2 %) puis à Paris (17,1 %) et de fortes concentrations s'établissent dans certaines communes (45 % à Clichy sous Bois) ».

« La proportion de population étrangère et plus généralement immigrée étant devenue un élément récurrent du débat politique, François Héran, directeur de l'Ined, a récemment tenu à dissiper quelques confusions : « La France est certes un vieux pays d'immigration, mais il y a déjà vingt-cinq ans qu'elle n'est plus un pays d'immigration massive. Elle est devenue au contraire le pays d'Europe où la croissance démographique dépend le moins de l'immigration » explique t il. « Le problème à résoudre concerne d'abord l'intégration des enfants issus des grandes vagues migratoires ouvrières des années 1950-1974 ». Les flux constatés restent très en deça de ceux constatés en Allemagne et en Europe du Sud. Cas particulier du Luxembourg et de la Suisse mis à part, les proportions les plus fortes d'étrangers se trouvent en Autriche (9,3 %), en Allemagne (8,9%) et en Belgique (8,3%). Suivent la Grèce (7,0%), l'Irlande (5,8 %) et la France (5,5%) suivie de près par la Suède (5,3%)... A bon entendeur et surtout à qui veut bien entendre !

Demandez vous juste où se trouvera la plus forte proportion d'étrangers par rapport à la population française, et en raison de la ségrégation de cette commune par les autres communes alentour, de l'isolement de ces populations, vous aurez le plus formidable détonateur !

Et qu'on ne vienne pas dire que les hommes politiques n'y peuvent rien puisqu'ils disposent de cette clé de lecture. Que la loi SRU soit appliquée au lieu d'être le masque de l'hypocrisie ambiante.

Dis moi comment tu traites tes étrangers, je te dirai quelle démocratie tu es. Un critère décisif de la démocratie, plus surement que la loi du nombre.

Comment ne pas faire le rapprochement avec la graine et le mulet, et les difficultés d'ouvrir un restaurant quand on est d'origine maghrébine, quand bien même la personne se trouve en France depuis plus de 30 ans. Sans parler des harkis.

Les débuts de Sinik : http://www.telechargementz.org/2008/02/18/rs_sinik__malsain_2000.html

La polémique sur les propos des rappeurs, particulièrement bien choisis pour ne pas parler des autres textes, plus dérangeants car plus révélateurs de l'injustice : http://www.rfi.fr/actufr/articles/071/article_40046.asp

Un autre avis favorable sur Sinik : Réaliste mais pas cynique http://www.ciao.fr/Sinik_la_main_sur_le_coeur__Avis_876905

Un blog que j'aime bien sur Sinik :
http://unrevecommence.canalblog.com/archives/2008/02/08/7884811.html



Mélange de haine et de douceur, sans concession,

1 Une époque formidable
free music


La video : http://fr.youtube.com/watch?v=hP48CektICI&feature=related

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36659.1

2 Deux victimes / Un coupable
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La video : http://fr.youtube.com/watch?v=bRdJA9_4z0Q&feature=related

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36660.1

3 Mots pour maux
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Ls paroles : http://www.paroles.net/chanson/36661.1

4 Viens
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Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36662.1

5 S.I.N.I.K.

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6 Reves et cauchemars
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La vidéo : http://fr.youtube.com/watch?v=xgbqP7w2H9k

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36664.1


7 D.3.3.2
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La vidéo : http://fr.youtube.com/watch?v=YKagvgK85sY&feature=related

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36665.1

8 Le même sang
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La video : http://fr.youtube.com/watch?v=JwTqMZ3WLNY&feature=related

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36666.1

9 Sombre :
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La video : http://fr.youtube.com/watch?v=_ZZ22VSeRdU

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36667.1

10 Règlement extérieur
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La vidéo : http://fr.youtube.com/watch?v=6n8mDfZOvg0&feature=related

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36672.1

11 Rue du Paradis
free music


La video : http://fr.youtube.com/watch?v=I5DDyozlx6U

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36668.1

12 Pardonnez moi :
free music


La video : http://fr.youtube.com/watch?v=KNI8IyaT7V0&feature=related

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36669.1

13
100 mesures de haine :

free music


Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36670.1

14 Coeur de pierre

free music


La video : http://fr.youtube.com/watch?v=JwTqMZ3WLNY&feature=related

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36671.1

15 L'assassin :
free music


La video : http://fr.youtube.com/watch?v=9FoYEC22zCQ

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36648.1

16 Dis leur de ma part
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La video : http://fr.youtube.com/watch?v=odh7J38QeRo&feature=related

Les paroles : http://www.paroles.net/chanson/36651.1


lundi 12 mai 2008

Déclaration d'amour !

Portishead a ouvert une nouvelle voie

Album faramineux que Third.

Bon voyage !

Portishead a raison : l'album se lit comme un tout

Le piratage a fait du mal à l'album en raison de l'émiettement des morceaux et à cause de cela, des critiques qui n'ont pas compris l'ensemble. Tout révèle sa consistance à l'écoute de l'album entier

C'est un voyage dans un univers stupéfiant. Une cohérence nouvelle. Portishead s'est renouvellé

Beth Gibbons a encore su conquérir de nouveaux espaces et y inviter ses acolytes. Portishead fait mieux que se perpétuer. Il renaît.

Ils ont pris des risques insensés, sont repartis de rien ou presque de ce qu'ils savaient faire.

L'album se finit avec une corne de brume : l'impression d'avoir aperçu une sirène dans la brume.


La "réciprocité organique" ou le don

Ma mère a mis de côté les meilleurs morceaux de viande douce, les « freskadennou ». Une part en sera distribuée aux proches voisins pourqu'ils puissent connaître le goût de l'animal. De leur côté, quand il arrivera de tuer le cochon chez eux, ils ne manqueront pas de nous en offrir un morceau exactement équivalent de celui qu'ils auront reçu de nous. Ils ne se trompent jamais, ni nous non plus. C'est au point que j'ai cru possible, quand j'étais plus petit, voyant telle ou telle femme nous apporter une tranche de son cochon, qu'elle nous rendait notre offrande restée aussi fraîche, après un mois ou deux, que le jour où elle avait été prélevée par le couteau précis de Yann ar Vinnell (l'homme qui vient découper la viande). La grandeur des morceaux est à la mesure de la chaleur de l'amitié. C'est pourquoi ma mère enveloppe chacun d'eux dans un torchon blanc et dissimule le paquet sous son tablier avant de traverser la route et de faire les dix ou cinquante pas pour le porter à la destinataire. Celle-ci ne montre le cadeau à personne, si elle est femme de bonne civilité, et elle ne cherchera pas à voir la part des autres. C'est la sagesse même, cette sagesse qui préserve la bonne entente et qui vous permet de manger de la viande douce plusieurs fois par an, alors que votre ordinaire est fait de lard salé.

Pierre-Jakes Hélias. « Le cheval d'orgueil ».

Camus et l'école

Avec M.Bernard, cette classe était constamment intéressante pour la simple raison qu'il aimait passionnément son métier. [...] Seules les mouches par temps d'orage détournaient parfois l'attention des enfants. Elles étaient capturées et atterrissaient dans les encriers, où elles commençaient un mort hideuse, noyées dans les boues violettes qui emplissaient les petits encriers de porcelaine à tronc conique qu'on fichait dans les trous de la table. Mais la méthode de M.Bernard, qui consistait à ne rien céder sur la conduite et à rendre au contraire vivant et amusant son enseignement, triomphait même des mouches. Il savait toujours tirer au bon moment de son armoire aux trésors la collection de minéraux, l'herbier, les papillons et les insectes naturalisés, les cartes qui réveillaient l'intérêt fléchissant de ses élèves. Il était le seul dans l'école à avoir obtenu une lanterne magique et, deux fois par mois, il faisait des projections sur des sujets d'histoire naturelle ou de géographie. En arithmétique, il avait institué un concours de calcul mental qui forçait l'élève à la rapidité d'esprit. Il lançait à la classe, où tous devaient avoir les bras croisés, les termes d'une division, d'une multiplication ou parfois d'une addition un peu compliquée. Combien font 1 267 + 691 ? Le premier qui donnait le résultat juste était crédité d'un bon point à valoir sur le classement mensuel.

Les manuels étaient toujours ceux qui étaient en usage dans la métropole. Et ces enfants qui ne connaissaient que le sirocco, la poussière, les averses prodigieuses et brèves, le sable des plages et la mer en flammes sous le soleil, lisaient avec application, faisant sonner les virgules et les points, des récits pour eux mythiques où des enfants à bonnet et cache-nez de laine, les pieds chaussés de sabots, rentraient chez eux dans le froid glacé en traînant des fagots sur des chemins couverts de neige, jusqu'à ce qu'ils aperçoivent le toit enneigé de la maison où la cheminée qui fumait leur faisait savoir que la soupe aux pois cuisait dans l'âtre. Pour Jacques, ces récits étaient l'exotisme même. Il en rêvait, peuplait ses rédactions de descriptions d'un monde qu'il n'avait jamais vu, et ne cessait de questionner sa grand-mère sur une chute de neige qui avait eu lieu pendant une heure vingt ans auparavant sur la région d'Alger. Ces récits faisaient partie pour lui de la puissante poésie de l'école, qui s'alimentait aussi de l'odeur de vernis des règles et des plumiers, de la saveur délicieuse de la bretelle de son cartable qu'il machouillait longuement en peinant sur son travail, de l'odeur amère et rèche de l'encre violette, surtout lorsque son tour était venu d'emplir les encriers avec une énorme bouteille somre dans le bouchon duquel un tube de verre coudé était enfoncé, et Jacques reniflait avec bonheur l'orifice du tube, du doux contact des pages lisses et glacées de certains livres, d'où montait aussi une bonne odeur d'imprimerie et de colle, et, les jours de pluie enfin, de cette odeur de laine mouillée qui montait des cabas de laine au fond de la salle et qui était comme la préfiguration de cet univers édénique où les enfants en sabots et en bonnet de laine couraient à travers la neige vers la maison chaude.

Seule l'école donnait à Jacques et à Pierre ces joies. Et sans doute ce qu'ils aimaient si passionnément en elle, c'est ce qu'ils ne trouvaient pas chez eux, où la pauvreté et l'ignorance rendaient la vie plus dure, plus morne, comme refermée sur elle-même ; la misère est une forteresse sans pont-levis.

Non, l'école ne leur fournissait pas seulement une évasion à la vie de famille. Dans la classe de M.Bernard du moins, elle nourrissait en eux une faim plus essentielle encore à l'enfant qu'à l'homme et qui est la faim de la découverte. Dans les autres classes, on leur apprenait sans doute beaucoup de choses mais un peu comme on gave les oies. On leur présentait une nourriture toute faite en les priant de vouloir bien l'avaler. Dans la classe de M.Germain (l'auteur donne ici le vrai nom de l'instituteur), pour la première fois, ils sentaient qu'ils existaient et qu'ils étaient l'objet de la plus haute considération : on les jugeait dignes de découvrir le monde.

Albert Camus, « Le Premier Homme »


Mes thèmes préférés

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Mes citations

"Le bien suprême était là, dans le cercle des choses et de la nature humaine.
Je ne demande plus où il est : il fut dans le monde, il y peut revenir, il n'y est maintenant qu'un peu plus caché. Je ne demande plus ce qu'il est : je l'ai vu et je l'ai connu."

Hölderlin, Hyperion



"Dans tes faux-fuyants,
Les crimes ont été escamotés
Dans un endroit
Où ils peuvent oublier"

Portishead



"Je suis d'une morale douteuse : je doute de la morale des autres"

Marguerite Duras



Je suis bourré de condescendances
Pour mes faiblesses si dures à avaler
Ce qui fait que je flanche
Quand on essaie de m'apprécier

Miossec, le chien mouillé (en silence)