lundi 15 juin 2009

Quatre vérités à propos de l'Europe ... vues de Roumanie

Sous le titre Certains sont plus égaux que d'autres, cet article clairvoyant et politiquement incorrect recadre le débat et montre que les grands Etats se font les champions de faire respecter des règles qu'eux mêmes bafouent ou organisent la restriction d'accès au marché dont ils ont profité :

la veille des élections européennes, une série d’événements donne une image ­angoissante de l’Union, et en par­ticulier de la place qu’occupe notre région en son sein.

Premièrement, le cap des cinq ans de la première vague d’élargissement aux pays de l’ancien bloc communiste vient d’être franchi. Mais cet anniversaire est passé inaperçu, avec une absence de festivités officielles qu’on peut presque qualifier de grossière, étant donné l’énorme appétit des institutions européennes pour ce genre d’événement. La raison ? Les leaders ouest-européens voudraient, pour la plupart, qu’on oublie leur rôle dans l’élargissement, eu égard aux craintes profondes de leurs électorats vis-à-vis du plombier polonais, du menuisier tchèque, etc. Sur fond d’une crise qui amplifie encore les attitudes irrationnelles du public envers la mondialisation et le capitalisme, personne n’a envie de célébrer un événement qui a exposé à plus de concurrence les douillets prolétaires ouest-européens.

Deuxièmement, l’Allemagne et l’Autriche ont décidé de continuer à imposer aux ressortissants des huit pays ex-communistes des restrictions à l’accès à leur marché du travail. Une mesure perçue comme insultante, d’autant qu’elle vient de deux pays qui ont largement profité des fruits de l’élargissement de l’UE en termes de nouveaux marchés et de nouveaux sites de production. Nous sommes face à un message clair : que certains aient bénéficié de cette manne ne signifie pas que l’on doive s’attendre à ce qu’ils renvoient l’ascenseur, comme le veut la fameuse solidarité européenne, qui, de fait, n’existe que sur le papier.

Troisièmement, une étude récente conclut que la libre circulation des travailleurs contribue pour quelque 50 milliards d’euros par an au PIB de l’Union. Lorsque la crise sera finie, cette somme sera multipliée par deux, affirme la même étude, sponsorisée par… la Commission européenne. Le message ? La réalité économique ne justifie pas les dérapages nationalistes et protectionnistes des Occidentaux. Quatrièmement, la Commission a déclaré qu’elle prendrait des mesures de rétorsion contre la Roumanie (et elle l’a fait), parce que, avec un déficit budgétaire de plus de 3 %, celle-ci contrevient à l’une des principales dispositions du pacte de stabilité. Le fait que des pays comme la France ou l’Allemagne dépassent depuis longtemps ce taux sans se voir pénaliser est un sujet que l’on ne doit pas évoquer, parce que ce n’est pas poli. Que faut-il comprendre ? Que même dans une Union solidaire, certains sont plus égaux que d’autres.

Aucun de ces messages n’est une nouveauté. Toutefois, leur accumulation en un laps de temps aussi court, en pleine crise, souligne à quel point la Roumanie et ses sœurs ex-communistes sont seules, dans une Union où chacun fait en réalité ce qui est le mieux pour lui, même si dans les discours c’est le bien commun qui prévaut.


* Conseiller auprès du président du Sénat de Roumanie, Courrier International, n° 971 11.06.2009

Aucun commentaire:

Mes thèmes préférés

Rokia Traore - Un cri d'amour pour l'Afrique

Irma vep

Irma vep
Maggie Cheung

Mes citations

"Le bien suprême était là, dans le cercle des choses et de la nature humaine.
Je ne demande plus où il est : il fut dans le monde, il y peut revenir, il n'y est maintenant qu'un peu plus caché. Je ne demande plus ce qu'il est : je l'ai vu et je l'ai connu."

Hölderlin, Hyperion



"Dans tes faux-fuyants,
Les crimes ont été escamotés
Dans un endroit
Où ils peuvent oublier"

Portishead



"Je suis d'une morale douteuse : je doute de la morale des autres"

Marguerite Duras



Je suis bourré de condescendances
Pour mes faiblesses si dures à avaler
Ce qui fait que je flanche
Quand on essaie de m'apprécier

Miossec, le chien mouillé (en silence)