dimanche 20 février 2011
Le cinéma iranien ... vital !
Il est vivificateur, à l'image de la démocratie iranienne qui a de tout temps secoué la société civile iranienne, qui ne laisse jamais ces despotes tranquilles !
Nous sommes allés voir Jafar Panahi deux fois récemment à la cinémathèque française
Le ballon blanc est l'histoire d'une fillette admirablement têtue qui veut acheter un poisson rouge pour le nouvel an et à qui les péripéties vont s'amonceller, au travers d'une quête dans la ville. Il filme la vie quotidienne et lui donne une telle vie qu'on suit, qu'on s'amuse, qu'on a peur avec la jeune fille quand survient le serpent !!! Bref on ne s'ennuie pas en restant dans la vie quotidienne comme Kechiche peut nous tenir en haleine pendant deux heures avec la confection d'un couscous !
Avec pour personnages principaux les interprètes les plus difficiles à bien filmer, des enfants, Panahi démontre qu'il excelle pour montrer au plus près les situations quotidiennes, il sait à la fois en respecter l’authenticité et en faire un conte fantastique et une fable morale.
Le second film est celui de jeunes femmes qui veulent à tout prix se rendre au stade de football à l'occasion du match qui peut conduire leur équipe nationale à la coupe du monde. Le monde du football est interdit aux filles mais elles n'en ont que faire, et comme le tournage du film, elles font preuve de clandestinité pour s'introduire dans le stade ! Le statut de la femme est évidemment au coeur du film mais Panahi réalise un film mi comique mi tragique, ces filles sont hors jeu, mises hors le jeu, comme la règle au football. Elles se moquent suffisamment ou ouvertement du système, font preuve de bravitude pour reprendre une expression connue ! Et le contraste avec la ferveur du stade, connue dès les instants des bus qui conduisent les supporters et où une jeune fille cache son angoisse dans la liesse générale du bus !
La distinction entre les novices qui n'ont pas su correctement se couper les cheveux et sont clairement des filles avec les expérimentées qui ont des coupes de garçons voire pour l'une d'elles un costume d'officier qui fera d'elle auprès de ses camarades d'infortune une star pour l'audace de son stratagème !
Très critique envers la situation sociale dans le pays, ses films, tournés dans des conditions de semi-clandestinité, sont interdits en Iran, alors même que Panahi y est désormais considéré comme la personnalité la plus marquante au sein de sa génération de cinéastes. Arrêté déjà en début d'année 2010, son siège était resté vide au festival de cannes où il devait être juré. De même au festival de Berlin en ce début d'année 2011 puisqu'il vient d'être emprisonné pour subversion pour 6 ans avec une interdiction de filmer pendant 20 ans ! La communauté internationale se mobilise pour lui venir en aide.
Le rappel de son arrestation fin décembre :
Une invitation à regarder ses films
C'est néanmoins un autre film iranien qui a remporté l'ours d'or à Berlin, d'un autre grand réalisateur iranien. le pouvoir de créativité du cinéma iranien n'a d'égal que le zèle de la censure des autorités de leur pays.
Ours d'or du festival de Berlin 2011 :
Ashgar Farhadi est ce cinéaste primé : je vais vous parler de son précédent film, A propos d'Elly, qui filme la société iranienne dans sa complexité, prisonnière malgré elle de traditions et du regard porté par les autres, même auprès d'une jeunesse qui se veut libérée ! Mais qui rejoue les failles de la faible liberté des femmes dans ce pays.
Un groupe d'amis étudiants passe des vacances dans une vaste demeure au bord de la mer Caspienne. Sepideh, qui s'est occupée de l'organisation, a décidé d'inviter Elly, en espérant que celle-ci ne soit pas indifférente au charme de son ami Ahmad, qui sort tout juste d'une rupture. Les vacances se passent dans la bonne humeur, jusqu'à la soudaine disparition d'Elly...
On y mèle la tension d'un très bon scénario qu'on ne voit pas venir à la critique sociale qui se montre de plus en plus féroce, les personnages se découvrant et se montrant prisonniers des limites que leur impose la société, toute cette évolution induite par la disparition d'une jeune femme ! La tension est remarquablement présente dès le début du film, mise en scène fortement par le cinéaste qui nous tient en haleine : il nous fait deviner l'imminence d'un drame ...
Je suis entièrement d'accord avec ce jugement de Télérama :
A propos d'Elly (Ours d'argent au Festival de Berlin), tourné bien avant la contestation anti-Ahmadinejad (et sa répression), commence presque comme une oeuvre occidentale. Des amis vont passer le week-end au bord de la mer : voitures puissantes, ambiance festive, etc. Il y a trois couples et un célibataire que la jolie Sepideh aimerait bien caser avec la timide Elly, invitée surprise. Ça complote sec jusqu'à ce qu'Elly disparaisse sans laisser la moindre trace.
Après les scènes de groupe gaiement pagailleuses, et très réussies, changement de ton brutal : au fur et à mesure qu'on s'interroge sur l'identité et le destin d'Elly, surgit un Iran plus traditionnel où la femme est opprimée. Mais au-delà du sujet proprement dit, le film intéresse par ce qu'il montre incidemment : des classes moyennes à demi occidentalisées, une timide libéralisation des moeurs et des femmes qui se baignent entièrement... vêtues. A son meilleur, il donne à voir des individus qui se croient libres alors qu'une force plus puissante qu'eux cadenasse leur vie. Appelons-la tradition, ou dictature.
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"Le bien suprême était là, dans le cercle des choses et de la nature humaine.
Je ne demande plus où il est : il fut dans le monde, il y peut revenir, il n'y est maintenant qu'un peu plus caché. Je ne demande plus ce qu'il est : je l'ai vu et je l'ai connu."
Hölderlin, Hyperion
"Dans tes faux-fuyants,
Les crimes ont été escamotés
Dans un endroit
Où ils peuvent oublier"
Portishead
"Je suis d'une morale douteuse : je doute de la morale des autres"
Marguerite Duras
Je suis bourré de condescendances
Pour mes faiblesses si dures à avaler
Ce qui fait que je flanche
Quand on essaie de m'apprécier
Miossec, le chien mouillé (en silence)
Je ne demande plus où il est : il fut dans le monde, il y peut revenir, il n'y est maintenant qu'un peu plus caché. Je ne demande plus ce qu'il est : je l'ai vu et je l'ai connu."
Hölderlin, Hyperion
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1 commentaire:
ouah ! tout ça est bien d'actualité en ce moment !
certains pays commencent à combattre la dictature .... c'est l'ouverture ...
c'est bien de pouvoir voir ce genre de film.
Pas encore assez avertie ici pour savoir si on peut les voir ....
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